Fontainebleau 2024 : La Normandie domine la Bretagne dans le Championnat des 5 ans Juments
Deux belles Normandes se sont octroyées les deux premières places de ce Championnat SHF, mais à la faveur d’une meilleure note de style lors de la première épreuve qualificative, JAWELLA DE LEVAUX a pris l’ascendant sur sa dauphine, JINJA MOUCHE. JOLIEMOME complète ce podium en étant la troisième et dernière de cette finale à terminer à moins d’un point.
Jawella de Levaux, une Championne d’enfer
Julien Covini est un habitué de la Grande Semaine de Fontainebleau, et son affixe s’installe progressivement dans le paysage sportif hexagonal. Avec JAWELLA DE LEVAUX, il signe l’une de ses plus belles réussites. Débutée à 4 ans par Eric Lelièvre, la jument bai foncé avait déjà pris part aux finales SHF 2023 après un double sans faute au CIR de Rosières. Cette saison, la fille de Conte Bellini a enchaîné 12 parcours parfaits sur 13, avant de s’adjuger le CIR de Cluny et se présenter sur le Grand Parquet à la 9ème place du Top 100 SHF. Sa génétique très européenne est truffée de gagnants...et pour cause, sa grand-mère n’est autre que Wella I (Lord, holst), la mère d’un certain Quaprice Boimargot (Quidam de Revel, sf), grand performeur international avec Patrice Delaveau. Outre l’élevage de Rodolphe Bonnet et Laetitia Viollet, Wella I a offert à plusieurs éleveurs une descendance remarquée, notamment les affixes « de Hus », « de Kreisker » et donc « d’Enfer ». Jawella est le premier produit de Tawella Denfer, la fille de Wella I, à fouler le sable bellifontain, emmenée par un pilote chevronné. « J’ai un peu l’habitude des championnats » dit Eric Lelièvre, « j’essaie de ne pas entrer dans le système de la pression et de rester détendu. La jument est assez fiable, elle n’a loupé qu’un tour, j’étais assez confiant. Je craignais un peu le triple car il y avait beaucoup de fautes, mais elle l’a très bien sauté. J’ai fini le parcours plus décontracté. » Déçu lors de la finale 2023 où la belle avait dérobé sur la rivière, son cavalier a pu savourer le fruit de son patient travail. « Je travaille avec son propriétaire Philippe Georgé depuis des années. Il l’a acheté à mon ami Julien Covini, dont nous avions eu déjà Mirage de Levaux (CSI5* avec Simone Coata, ndlr). Elle a déjà trois frères et sœurs qui sautent 1,50m, c’est une jument prometteuse, maligne et adroite. »
JAWELLA DE LEVAUX & Eric Lelièvre - Crédit photo : PSV Photo
Habitué de la Grande Semaine depuis plus de vingt ans, Eric Lelièvre n’en est pas à son coup d’essai. « J’ai gagné la finale des 6 ans avec Cheyenne de la Violle, puis le Championnat des 7 ans. J’avais terminé deux fois deuxième des 5 ans mais je n’avais jamais gagné ». C’est chose faîte, pour le plus grand plaisir du propriétaire. « J’ai rendu visite à Julien Covini, un ami » raconte-t-il, « nous avons fait le tour de ses prés. J’avais fait naître un Conte Bellini mais un mâle alors que j’aurais voulu une femelle. J’ai vu cette pouliche, et je lui ai proposé de lui acheter. Je l’ai récupérée à un an, je l’ai débourrée et Eric a pris le relais à 4 ans. » Passionné d’élevage, éleveur amateur depuis 25 ans à raison d’un ou deux poulains par an, Philippe Georgé se repose entièrement sur son pilote. « Tout ça, c’est grâce à Eric » insiste-t-il. « De temps en temps, on achète un cheval ensemble, on le valorise, on le revend et cela m’a permis de constituer ma trésorerie d’amateur, afin de ne pas prendre sur le budget familial. » Ce Vosgien, installé entre Epinal et St Dié sur une dizaine d’hectares, profite pleinement de sa seconde vie après avoir formé des enseignants dans le domaine de la robotique. « J’essaie de comprendre la mécanique du cheval...mais c’est plus compliqué, on ne peut pas programmer ! » dit-il en souriant. « Nous avions quelques contacts pour la vendre. Mais en accord avec son naisseur, nous ferons peut-être des transferts l’an prochain. Elle a la capacité de disputer les 6 ans, donc pourquoi ne pas poursuivre l’aventure ? ».
JAWELLA DE LEVAUX & Eric Lelièvre - Crédit photo : PSV Photo
Jinja fait Mouche
Après le Calvados, nous voici dans la Manche, plus précisément aux portes de Villedieu-les-Poëles, célèbre cité du cuivre et des cloches. C’est là que la famille Bellet a posé ses valises depuis trois générations, sur environ 170 hectares où paissent 180 chevaux et 300 vaches. Un écrin idéal pour faire éclore de petites pépites qui galopent aujourd’hui sur les plus beaux terrains du monde. A n’en pas douter, JINJA MOUCHE, bien qu’encore jeune, en est une. Génétiquement, elle incarne une grande part de l’histoire du stud-book Selle Français via Danae (Starter, sf). Née en 1969 chez Marcel Lebourgeois, cette matrone a engendré une descendance prolifique, essaimant son précieux patrimoine dans les plus beaux élevages de France et d’Europe. Sa fille la plus fameuse reste à ce jour sa dernière, Betty de Kreisker (Muguet du Manoir, sf), née lorsqu’elle avait vingt ans et à l’origine de Helisa de Kreisker (ISO 152), Jumpy de Kreisker (ISO 164, mère de nombreux gagnants), Kirfa de Kreisker (ISO 171), Liberto de Kreisker (ISO 150)… Carpont, Lozonnais, Riverland, d’Helby, des Ibis lui doivent une fière chandelle. Ce patrimoine passa successivement entre les mains expertes de Paul Lesoimier (‘du Mesnil’) et Yves Langelier (‘Chanu’), pour finalement terminer chez les Bellet grâce à Colombe du Chanu Z (Consul dl Vie Z), sœur utérine de des étalons Quartz du Chanu et Emir du Chanu.
JINJA MOUCHE & Clément Mestre - Crédit photo : PSV Photo
Championne des 4 ans l’an dernier, Jinja Mouche a répété ses gammes. « Nous avions cinq chevaux sur ces finales, et nous sommes vraiment contents » dit Julien Bellet. « On venait assez sereins. Plus elle sautait cette saison, mieux elle sautait. Elle est déjà venue ici à deux ans, et à 4 ans, elle a réalisé une saison en dents de scie. Cette année, je me suis occupé de deux 5 ans en parallèle et je n’arrivais pas à obtenir des embryons. Heureusement, j’ai eu une bonne pouliche de Jinja par Mylord Carthago l’an dernier. J’ai préféré laisser l’autre pour ne pas être tenté de la vendre. Jinja vient d’une souche achetée par mon papa, celle du « Chanu ». A l’époque, nous avions révélé Quartz du Chanu que nous avions fait acheter à des propriétaires italiens. Elle nous tient à coeur, Yves Langelier habite à cent mètres, nous connaissons tout son élevage. Dès le premier poulain de Colombe, Gadget Mouche, nous avons eu un super produit qui gagne à Aix-la-Chapelle cette année avec les Philippaerts. Colombe sautait de façon exceptionnel même si elle avait une bouche compliquée. » Ravi de la performance de sa protégée, Julien Bellet tente de garder la tête froide. « En venant ici, nous savions qu’on allait nous courir après. On a bloqué la jument pour le grand sport avec la famille Philippaerts par l’intermédiaire de Grégoire Hercelin. Ils en ont la moitié et nous allons la construire gentiment, en espérant la voir sur les plus grands terrains. Elle n’a jamais d’émotion, rien ne lui fait peur, elle ne doute jamais d’elle. Elle possède une puissance dans le jarret et une élasticité incroyables. Si tout s’aligne, elle devrait aller loin...jusqu’à Aix ! ». L’histoire est en marche.
JINJA MOUCHE & Clément Mestre - Crédit photo : PSV Photo
Joliemome, la belle amitié de deux passionnés
La Championne du CIR de Lamballe a montré qu’elle avait toute sa place dans ce Championnat SHF. Cette fille de Mylord Carthago, étalon le plus représenté lors de ces finales, est aussi le symbole d’une histoire amicale, celle réunissant Arnaud Bourdois et Thierry Raoult. « Je monte Joliemome depuis le début car elle est née à la maison » explique Arnaud. « L’an dernier, deux amis ont débuté la jument sur le circuit des 4 ans car je m’étais cassé la main. J’ai pris le relais ensuite. » Absente de la finale 2023, Joliemome a repris de plus belle cette année, terminant ses épreuves qualificatives par le titre de Championne du CIR de Lamballe. « Elle a réalisé une finale des 5 ans à l’image de sa saison, toujours respectueuse, sérieuse. Sa mère, Lorette, était une très bonne jument de concours mais avec son petit caractère. Le mariage avec Mylord Carthago a bien fonctionné. Ça a donné une jument très facile à monter, tout en étant aussi concours que sa mère. »
JOLIEMOME & Arnaud Bourdois - Crédit photo : PSV Photo
Confiant dans le potentiel de sa partenaire, Arnaud Bourdois a abordé chaque épreuve avec pragmatisme. « Elle répond toujours présente. Nous savions qu’il fallait que tout s’aligne, et cela s’est bien déroulé jusqu’au bout. » Sacré Champion de France Pro 2 en juin dernier, le Breton élève peu, essentiellement avec des juments qu’il a monté. « Il y a deux ans, Hix Hix Elle, née à la maison, terminait 2ème des 5 ans. C’est une fille de Luidam sur Qualine de Launay, une jument que j’ai montée également sur le circuit SHF. » Co-naisseur avec Thierry Raoult, Arnaud a finalement cédé sa part à son associé au début de l’année de 4 ans, ce dernier souhaitant la conserver. « L’idée numéro un est d’abord de lui faire plaisir car c’est sa passion, comme beaucoup de propriétaires. Il a résisté aux propositions » dit-il. Une chance pour le cavalier qui pourra compter sur Joliemome la saison prochaine.
JOLIEMOME & Arnaud Bourdois - Crédit photo : PSV Photo
Le cavalier de JAWELLA DE LEVAUX, Eric Lelièvre nous livre son sentiment après cette victoire :
Le palmarès de ce Championnat Cycle Classique 5 ans Juments 2024
1- Jawella de Levaux, sf (Conte Bellini, westf), née chez Julien Covini, montée par Eric Lelièvre (Aube) – 14 sans faute sur 15 sorties – 9ème du Top 100 SHF – 1488 € de gains
2- Jinja Mouche, sf (Dollar du Rouet, sf), née chez Roland Bellet (Normandie), montée par Clément Le Mestre (Manche) – 13 sans faute sur 15 sorties – 32ème du Top 100 SHF – 1391 € de gains
3- Joliemome, sf (Mylord Carthago, sf), née chez Arnaud Bourdois et Thierry Raoult (Bretagne), montée par Arnaud Bourdois (Côtes d’Armor) – 14 sans faute sur 15 sorties – 7ème du Top 100 SHF – 1536,83 € de gains